Gérard MENDEL

La crise de la psychanalyse

Pouvoirs n°11 - La psychanalyse - novembre 1979 - p.89-104

Qu’est-ce que le pouvoir pour la psychanalyse ? Rien, en théorie du moins, que son expression comme fantasme : de puissance ou de castration, de toute-puissance ou de néantisation.

A prendre ainsi la vie sociale pour un songe, on s’expose à de sévères effets en retour. Ils ont nom aujourd’hui Lacan, ici, Hartmann, là-bas.

Mais l’anecdote risque de cacher les problèmes de fond. Jamais vraiment affrontés par la psychanalyse officielle depuis ses origines.

A savoir : quel rapport théorique, de nécessité ou bien de complaisance, la psychanalyse entretient-elle avec le fait social ? Lui reconnaît-elle une existence propre et fondée en droit ? Pense-t-elle qu’elle donne accès, à elle seule, à l’entier de la personnalité ? Ou bien, c’est là notre avis, ne parle-t-elle jamais chez l’adulte que de l’enfant de l’enfant d’une socioculture et d’une classe sociale ? Parce qu’elle n’a ni les outils, ni les concepts pour comprendre, ce qui dans la personnalité de l’adulte se produit de neuf de par les contradictions de la vie sociale. Elle ne sait rien non plus sur le pouvoir, la société, le travail, l’Histoire, l’avenir. C’est sur cet au-delà du champ psychanalytique que travaille la sociopsychanalyse.

Peut-être la grave crise qu’elle traverse actuellement aidera-t-elle la psychanalyse à aborder enfin le problème de ses limites, celui de son articulation avec ce qui n’est pas elle, et, enfin, celui de son incapacité de toujours à penser le changement historique des formes psychiques. Il y faudra l’abandon de vieilles lunes idéologiques, expressions, à leur manière, du pouvoir social dominant : la nature humaine, l’inconscient invariant, invariable, la loi (phallocratique) du Père.

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