René de LACHARRIÈRE
Opinion dissidente
Pouvoirs n°13 - Le Conseil constitutionnel - avril 1980 (juillet 1991) - p.141-159
Alors que la Constitution de 1958 lui attribuait un rôle modeste, le Conseil constitutionnel domine désormais l’ensemble de nos institutions, puisqu’il censure à son gré n’importe quelle loi, sur le recours de parlementaires empressés à le saisir en toutes occasions. Son omnipotence repose sur l’interprétation de formules vagues dont la mise en oeuvre relevait du législateur ou sur les principes d’une Déclaration qui, précisément, n’autorisait personne à tenir en échec la volonté générale exprimée par la loi. Les représentants de la nation, d’ordinaire fort jaloux de la souveraineté empruntée ou extorquée à celle-ci, se sont curieusement complu à ratifier et à parfaire leur propre dépossession. Maints juristes les y poussaient avec une extrême ardeur, pour des motifs qui méritent aussi d’être tirés au clair. D’où l’étrange résultat, au moins provisoire, d’une oligarchie suprême, totalement irresponsable et à l’évidence totalement injustifiable.