Philippe ARDANT, Marie MENDRAS
Introduction
Pouvoirs n°45 - L'URSS de Gorbatchev - avril 1988 - p.3
En 1978 Pouvoirs consacrait déjà un numéro à l’Union soviétique. Les points d’interrogation y étaient peu nombreux à l’exception de celui rituel sur les chances d’évolution du régime, qui recevait d’ailleurs une réponse pessimiste et la description était celle d’un paysage politique largement pris dans les glaces.
Dix ans plus tard, trois ans après l’arrivée au sommet de l’appareil de Mikhaïl Gorbatchev, la situation n’apparaît plus aussi bloquée et un réexamen des idées sur lesquelles on vivait auparavant s’impose. La problématique en effet est changée. Le discours a pris un ton nouveau sous lequel il faut rechercher si le message est le même ou si l’idéologie bouge. L’économie connaît des innovations qui ébranlent les mythes fondateurs. On parle de dégel dans l’intelligentsia et un vent d’autonomie passe sur les langues, cultures et traditions des nationalités, peut-être pour pouvoir renforcer en parallèle une centralisation au profit des Russes. La province est perplexe et pèse ce qui peut résulter de la perestroïka dans l’amélioration des conditions de la vie quotidienne. Les militaires débattent et définissent peut-être une nouvelle ligne en matière de défense. L’étranger est attentif : les pays de l’Est sont partagés entre la crainte d’un dérapage et la conscience plus ou moins aiguë de la nécessité d’aménager le système ; à l’Ouest on est hésitant devant un langage nouveau et séducteur auquel on aimerait voir succéder des actes. Toute cette effervescence est due à l’attitude de Mikhaïl Gorbatchev. Il n’est donc pas inutile de retracer la marche vers le pouvoir et la façon dont il le consolide.