Aujourd’hui : qui gouverne la Chine ?

Jusqu’en septembre 1976 la présence de Mao Tsé-Tung, obsédante, presque exhaustive avec son effigie ubiquiste, occupait à elle seule l’immense scène chinoise : le pouvoir en Chine s’y résumait. Son absence temporaire, une ombre parfois sur son pouvoir et ces dernières années les signes toujours plus apparents des atteintes de l’âge amenaient bien à l’occasion une interrogation, mais comme une démarche impie et fugitive tant le personnage imposait avec le respect l’image d’une domination absolue, légitime et sûre d’elle. Même aux périodes où les communistes chinois reconnaissaient sans détour que deux lignes se disputaient le pouvoir, il s’agissait avant tout de savoir à travers qui Mao gouvernerait.

Ainsi s’était créée une image de la Chine sur laquelle il faut bien, maintenant que le fondateur vénéré est mort, s’interroger. C’est par une réflexion sur cette image de la Chine en Occident que s’ouvre ce numéro.

Mais la Chine tant de fois millénaire n’est pas morte avec son héros. Qui détenait en réalité le pouvoir ces dernières années ? Quel est l’héritage ? Quel sera l’héritier ? Hua Kuo-Feng, « la bande des Quatre » ou Teng Hsiao-Ping ? Qui gouvernera demain ? Multiples reflets d’une même question aux réponses opposées et diverses : les masses appuyées sur la Constitution ou au contraire une poignée de dirigeants ? Le Parti communiste ou les bureaucrates de l’Administration ? L’Armée ou des responsables provinciaux qui se souviennent des seigneurs de la guerre ? Des idéologues enfermés dans leurs abstractions ou des technocrates rêvant de puissance ? Des forces centrifuges un moment contenues par le père de la patrie s’affrontent maintenant ouvertement, un nouveau jeu se met en place ou chacun cherche des alliés. A l’Est, est-ce l’aube de la démaoïsation ?