Daniel C. BACH

Application et implications de la charia: fin de partie au Nigéria

Pouvoirs n°104 - Islam et démocratie - janvier 2003 - p.121-133

La décision de 12 des 36 États de la Fédération nigériane de rétablir le droit
criminel de la charia a mis un terme à un cycle d’érosion de son champ d’application
depuis la conquête coloniale. Massivement plébiscitée dans le nord
musulman, la réforme du système judiciaire a d’abord fait figure de réponse
concrète à l’insécurité liée à une diffusion de la violence et de la corruption.
Les conditions d’administration du code criminel islamique réactualisent des
débats anciens du fait de son instrumentalisation politique et des tentatives
de réactivation d’une application des châtiments rigide et particulièrement discriminatoire
envers les femmes. La restauration de la charia s’inscrit également
dans un contexte général de montée des stratégies néo-traditionalistes dans les
autres régions et de régression de la capacité d’encadrement territorial de l’État
fédéral. Le modèle de type consociatif conçu à la fin des années 1960 pour
enrayer les pressions sécessionnistes est devenu dysfonctionnel et le Nigeria présente
de plus en plus fréquemment les caractéristiques d’un pays sans État.

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