Philippe ARDANT

Introduction

Pouvoirs n°35 - Le Japon - novembre 1985 - p.3

Et si le Japon était aussi un modèle institutionnel et politique ? La prospérité de l’économie a monopolisé l’attention d’un Occident en mal de recettes permettant de conjurer les crises. La découverte a d’ailleurs été, avant tout, la révélation d’une organisation sociale, d’un système de relations de travail, totalement étrangers aux mutations devenues traditionnelles à l’Ouest sous les influences conjuguées d’une certaine conception du libéralisme et du socialisme. En revanche, la structure du pouvoir politique, sa pratique, ont été négligemment
explorées, peut-être parce qu’elles semblaient ne manifester aucune efficacité particulière par rapport à ce qui avait été expérimenté autre part. Est-ce si certain ? A tout le moins n’est-il pas utile de mieux connaître et comprendre le système politique japonais ? Pouvoirs a posé la question à une dizaine de spécialistes japonais et français. On trouvera ici leurs réponses.

A leur lecture, le dépaysement n’est pas total : les emprunts au fonds commun des principes constitutionnels sont multiples, le système électoral a des faiblesses qui renvoient curieusement à des problèmes évoqués par le Conseil constitutionnel français pendant l’été 1985, la bureaucratie et le patronat, chacun de son côté, s’efforcent d’assurer leur emprise sur l’Etat. Mais, en même temps, les originalités éclatent : la conception du pouvoir est marquée par une soumission à l’autorité, à la hiérarchie, à la destinée, que le système éducatif renforce par la légitimation de l’élitisme et qui rend difficiles l’affirmation de la primauté de l’individu et la constitution de contre-pouvoirs. D’où une stabilité politique exceptionnelle autour du parti libéral-démocrate qui calme le jeu des factions. Et le Japon ouvre des voies inédites en matière de défense et de relations extérieures.

Ce numéro doit beaucoup aux conseils de M. Sakio Takayanagi, professeur à l’Université de Chuo. Qu’il en soit remercié.

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