Introduction

La décomposition du totalitarisme s’accélère. D’où ce numéro pensé de longue date, réalisé en urgence et malgré les dangers que comporte l’analyse historique immédiate lorsque l’histoire se bouscule enfin. Elle le fait à un rythme impossible à suivre. Ainsi l’Allemagne de l’Est a-t-elle commencé à basculer après remise du manuscrit de ce volume à l’imprimerie ; les Tchèques à leur tour se sont emparés de la rue. Nous avons choisi de ne pas attendre pour offrir les premiers éléments d’analyse de cette révolution démocratique à l’Est.

Claude Lefort réexamine le système totalitaire, dont on négligea parfois les contradictions. Henri Weber s’efforce d’expliquer pourquoi la conception léniniste de la démocratie exerça une telle attraction ; et pourquoi la conception social-démocrate la balaye aujourd’hui. Georges Lavau ne dissimule pas les risques de la démocratie, mais explique qu’ils ne justifient pas que l’on y renonce. Bertrand Badie s’interroge sur les limites de l’universalisme démocratique, et celles du culturalisme antidémocratique. Nous comprenons alors mieux pourquoi les lumières attirent et le totalitarisme les repousse. Reste à examiner les bouleversements en cours. Arrêtés en Chine, Jean-Luc Domenach montre la faiblesse du mouvement démocratique. Prolongés au-delà de ce que nous imaginions naguère en Pologne et en Hongrie, Aleksander Smolar et François Fejto en rendent compte. Quant à la mère patrie du socialisme, celle par qui, une fois de plus, le changement est arrivé, Irène Commeau a bien voulu s’interroger sur les soubresauts qui la secouent.